L’univers lumineux de l’artiste-peintre Andrea Vàradi

Née en Hongrie, Andrea Vàradi, réfugiée politique, a été marquée par les grands drames de l’histoire du 20ème siècle, la shoah, le communisme, et par l’exil. Résolument contemporaine dans le choix de ses sujets, elle s’exprime à travers un langage pictural d’inspiration classique et figuratif.
La série “Mémoires” convie des objets-témoins du passé et ravive des souvenirs enfouis. Les toiles font appel à notre sensibilité profonde et à nos facultés d’étonnement. Les tableaux consacrés au thème de la mémoire font renaitre des événements et atmosphères d’époques révolues : vieilles montres, chandeliers et livres anciens sont autant d’objets-témoins qui évoquent l’émigration, l’exil, le déracinement.
Une composition à la fois lumineuse et sombre, représentent d’anciennes valises superposées évoquant l’exil, le départ ainsi que les pages les plus tragiques de l’histoire du XXe siècle. La gravité du message et l’harmonieuse beauté de l’exécution, créent d’intenses émotions chez le spectateur. Sur une autre toile, deux vieux fauteuils semblent dialoguer dans un espace infini, et donnent, grâce à leurs caractéristiques quasiment humaines, l’impression d’être animés.
Un symbolisme fort se dégage de ces œuvres, et fait que nous sommes immédiatement subjugués par l’atmosphère puissante des toiles peuplées d’objets évocateurs du passé, qui nous concernent et nous interpellent.
L’artiste réalise peu de portraits, préférant travailler sur les objets qui revêtent des dimensions à la fois universelles et personnelles. Ceux-ci portent la mémoire des êtres, des destins, des événements qui jalonnent la vie et paradoxalement durent plus longtemps que les hommes.
Un univers pictural engagé et fascinant Au cœur de cette œuvre emplie d’émotions et de réflexions, nous ressentons le profond engagement de l’artiste à porter et transmettre la mémoire malmenée, contestée, banalisée ou simplement abandonnée, des grandes tragédies du XXe siècle.
Sur sa toile “A csillàr” (Le lampadaire) l’artiste fait appel à ses souvenirs pour cheminer vers l’avenir. Un chandelier à huit branches dont sept sont visibles, occupe l’intégralité de la toile, l’illumine de l’intérieur, telle une note d’espoir surgissant d’obscures profondeurs. La branche la plus proche du spectateur est lumineuse sans toutefois dégager de lumière. Sa présence est comme un point d’exclamation solitaire et résigné. Le chandelier est chargé d’histoire, de souvenirs. Il porte la nostalgie de temps anciens, et de l’espoir qui vacille vers l’avenir.
La série “Extérieurs Intérieurs” est traversée par un autre thème central qui aboli les frontières entre extérieur et intérieur, donne naissance à des paysages à la fois familiers et surréels, où les objets de notre quotidien se mêlent aux éléments de la nature. La cohabitation d’espaces intérieurs et extérieurs, d’objets fabriqués et d’éléments de la nature donnent lieu à des univers surprenants et enchanteurs, où paysages s’entremêlent dans une atmosphère à la fois hyperréaliste et surréaliste. Sur certains tableaux, des objets de notre vie quotidienne sont mis en scène dans la nature. Sur d’autres, ce sont des éléments de la nature qui pénètrent dans notre sphère urbaine privée. L’entrelacement de ces deux univers fait disparaitre la frontière entre l’extérieur et l’intérieur tant au plan physique que psychologique. Un univers très particulier prend ainsi naissance, de l’ordre du surréalisme philosophique.
Ces tableaux nous invitent à repenser notre rapport au monde, la pertinence de nos frontières géographiques et psychologiques, nos relations avec les autres, nos manières d’enfermer les êtres et les choses dans des catégories qui à leur tour nous enferment dans des modes de réflexions stériles et rigides. Un message universel.
Sur un des tableaux, on voit tournoyer dans le vent du linge suspendu sur une corde tirée entre deux montagnes. Une manière de suggérer que l’extérieur nous appartient aussi. « Nous avons un rapport très différent avec les objets que nous avons chez nous et ceux que nous voyons dans la rue », dit l’artiste. « Ces derniers ne nous concernent pas ou peu. Dans certaines régions, les maisons n’ont pas de porte. Le degré de séparation entre l’intérieur et l’extérieur est très différent selon les pays. La nature, la forme et la signification des frontières entre l’extérieur et l’intérieur, entre le privé et le collectif sont également très différentes selon les cultures. Placer des objets personnels dans la nature, dans des espaces à l’extérieur ou faire pénétrer la branche d’un vieil arbre dans une chambre est une manière d’inviter le spectateur à se sentir concerné par ce qui se passe à l’extérieur, au-delà de son espace personnel. Ce message invite à repenser les séparations, les concepts et habitudes qui sont devenus des évidences, mais ne correspondent pas à des réalités. »
L’imagination créatrice d’Andrea Varadi efface les frontières habituelles entre les catégories et en particulier entre les espaces intérieurs et extérieurs. La branche de l’arbre pénètre dans la chambre pour servir de support à un lampadaire à l’ancienne tandis que les objets semblent animés et nous remplissent d’émotions grâce à leurs caractéristiques quasiment humaines.
Le symbolisme poétique des œuvres ajoute une dimension profondément émotionnelle à une expérience visuelle surprenante.
Photos : Valises Chaises linge entre montagnes ou arbre dans chambre Photo de l’artiste
Tableaux commentaires
La branche de l’arbre pénètre dans la chambre pour servir de support à un lampadaire à l’ancienne tandis que les objets semblent animés et nous remplissent d’émotions grâce à leurs caractéristiques quasiment humaines.
Valises Le thème de la mémoire traverse l’œuvre d’Andrea Varadi
Andrea Varadi est née à Genève de parents hongrois. La passion pour l’art est apparue très tôt dans sa vie. Son père, architecte talentueux, a placé un crayon dans sa main dès sa plus tendre enfance. Cette passion est également un moyen d’expression naturel et spontané qu’elle utilise en permanence pour communiquer et pour s’exprimer. Toute petite, elle s’occupait pendant de longues heures à faire des dessins et peintures ou fabriquer des objets originaux et étonnants à mille facettes.
A l’âge de 6 ans elle était déjà remarquée pour ses talents d’expression artistique et pour sa créativité exceptionnelle. Ses œuvres les plus précoces portent déjà en elles les signes d’une grande sensibilité esthétique et véhiculent des messages forts et une puissante charge émotionnelle. Elle raconte : “Ma première toile était une œuvre picturale avec des éléments en relief, accompagnée d’un commentaire poétique sur la mémoire, sur l’entrecroisement de la mémoire collective et les souvenirs d’un petit garçon, qui voit pendant un instant, depuis une brèche du train qui le porte vers les camps, une famille attablée autour d’un dîner derrière les fenêtres d’une maison. Lorsque j’ai présenté le tableau, le jury était en larmes et le collège m’a demandé de refaire la présentation qui accompagnait l’œuvre devant des classes. En voyant à quel point mes camarades étaient bouleversés, j’ai réalisé qu’avec ma peinture, je pouvais provoquer des prises de conscience. J’ai compris que quelque chose de fort pouvait se transmettre.
Plus tard, elle peint, parallèlement à sa formation universitaire. Ne voulant pas interrompre ses études, elle ne parvient à donner suite à des propositions pour exposer à New York et en Europe. Elle a exposé à l’ONU, dans le cadre d’une exposition collective.
www.andreavaradi.com contact@andreavaradi.com