Cent ans ont passé depuis les célébrations ratées du deuxième centenaire. Haïti va se retrouver cette fois-ci comme une grosse machine de production sur la route du cinéma. La rivalité est régionale, elle est continentale et internationale. Comme aux Oscars, mais ils n’existent plus. Cependant c’est la première remise des Jean-Jacques d’or. Un père parle à sa fille : << j’ai le tract pour la première fois. Bref, tellement longtemps après l’avoir exorcisé dans mon adolescence >>. Le rendez-vous n’est pas de son initiative, c’est une loi naturelle de l’histoire. Il ne faut surtout pas la transformer en une loi artificielle, ça gâcherait tout. C’est un triptyque : un pays qui célèbre son triple centenaire, une route du cinéma qui mène enfin quelque part, un retour à Côte-plage. Le père rajoute : << je ne l’ai revu depuis près de cinquante ans >>. Ce père est un cinéaste qui réfléchit à haute voix. Il pense, il croit que son vrai J-J d’or est celui du film le Saxophoniste qui met en vedette Shiller Joseph dans le rôle de mon oncle. Mais c’est plutôt les rivales qui est programmé pour la cérémonie d’ouverture du festival et, Fréda Dantor, pour la clôture. Il poursuit : << vas donc comprendre le jury >>.
Il voit le tapis rouge depuis le boulevard J.J Dessalines à Carrefour. Des hôtesses le conduisent vers la section VIP. Des amis d’enfance, il les croyait morts. Ils sont pourtant là. En effet. Il n’est pas amnésique, ni illusionniste. Ce n’est pas un rêve et personne n’est mythomane. Les émotions sont fortes, l’adrénaline monte. Son œuvre principal décrivait l’évènement qu’il vit. Haollywood pour toi. Il a écrit 1 chronique par jour, 7 par semaine, sur 52 semaines, pendant des années. Nous sommes en 2104, son rêve se concrétise. Il ne comprend plus rien, tout ces gens devraient être tous morts, lui aussi d’ailleurs. Il partage sa crainte avec sa fille qui a fait le voyage avec lui. Les cheveux au vent, c’est la brise de mer, elle lui répond : << mais papa, tu as écris ton histoire pour 2104, tu as fait une projection sur le futur. C’est aujourd’hui la grande première de ton film, nous sommes à 89 ans du futur que tu décris, ce sont tes amis d’enfance que tu n’as revus depuis trop longtemps >>. Il lui répond : << comment >>. Sa fille poursuit : << tu m’as toujours dit que tu m’emmènerais un jour voir ton pays de naissance, nous y sommes >>. Il regarde sa fille, étonné, comme s’il entendait la voix de son père, loin dans le passé, tourne la tête, tend la main, vacille et tombe. Il meurt.
La question se posera plus tard : a-t-il tendu la main à son père pour le rejoindre dans l’au-delà ou pour se saisir du bras de sa fille ? Il est parti avec ce secret, sur le long tapis rouge qu’il avait toujours rêvé. C’est HAOLLYWOOD. Le cachet est considérable, 37 longs métrages, des documentaires sur l’esclavage, Côte-Plage est devenu un important port de plaisance qui héberge le plus important festival de cinéma en Haïtien. Il y aurait les villes de Grand-Goâves, de Cariès et de Bellanse aussi Mais nous sommes à Côte-plage 28. La mer relie tous ces ports du cinéma. Une image rétro va livrer. Un tap tap comme on les appelait autrefois, il s’arrête à toutes les intersections, soit pour déposer, soit pour embarquer. Autrefois, c’était des passagers, aujourd’hui, ce sont des paquets. Des bobines de films en échange, c’est le portrait type du service postal national. Chaque livraison est contée. Le film commence.
Quand Never a commencé à planifier ce scénario pour le ministère de la culture du pays, personne n’y croyait. Ce n’était d’ailleurs pas le rôle de la culture que de planifier pour le service postal. C’est de cette façon que le pays a fini par garder ce trait culturel du transport en commun, en l’intégrant dans la livraison postale pour le tenir vivant au quotidien. C’était aussi la façon d’éteindre les passions qui empêchaient la transition vers un système de transport moderne, sécuritaire et rentable. Gérard s’est perdu dans son propre jeu quand il est descendu du tram pour entamer la longue marche sur le tapis rouge qui menait près du port de plaisance de Côte-plage 28.
L’auteur nous transporte directement dans la cabine d’une ambulance où l’on tente de le réanimer. Mais en vain ! La nouvelle circule comme une trainée de poudre, tous les écrans placés sur le kilomètre de tapis rouge relaient l’information. Plus de 300 postes de diffusion émettent simultanément. Annie n’avait jamais vu ça auparavant, elle croie vivre un cauchemar. Non, c’est l’effet de la perte de son père qui est terrible. Ils ne sont arrivés que 8 heures plus tôt. Elle n’y connaît rien du pays si ce ne sont les récits embrasés de son père. Heureusement, seul document touristique qu’elle avait emmené, c’était un vieux fascicule que son père avait écrit alors qu’elle était encore enfant. Oui, le roman aussi. Elle l’ouvre et c’est une deuxième dimension du film qui la ramène à des visages plus jeunes mais encore en vie. Elle reconnait alors tous les amis de son père. Tel l’effet d’une cascade, le film propose des tiroirs aux mêmes dimensions du nouveau service postal. Sans hésiter, elle se rend dans la maison d’enfance de son père. Elle les voit tous. C’est en fait la lecture qui l’y conduit car la littérature de son père était taillée sur mesure pour faire vivre des récits vécus.
L’histoire nous ramène brusquement dans un vieux rêve de jeunesse de celui-ci. Il voulait être maire de sa ville. Le spectateur ne sait plus si c’est le fascicule ou le premier volet du film. Sa photo est sur tous les écrans de la ville, comme un poster de campagne électorale. Les gens le regardent tout en discutant. On annonce définitivement son décès, comme si le temps s’était arrêté, on venait d’arracher quelque chose entre les mains des citoyens de cette grande ville. La fille ferme le livre et l’image est floue, plein écran, l’inscription FIN arrive de loin, écrit en rouge sur fond blanc et s’arrête aux dimensions du dixième de l’écran. L’histoire est un puissant sujet freudien qui met en relief un brûlant désir qui prend forme dans un scénario de cinéma. La mémoire est mise à l’épreuve chez l’auteur même qui se noie dans sa fiction. Il vit profondément son personnage principal, se confond et meurt après une relecture, sans avoir eu le temps de réaliser son film. On compte désormais trois importants festivals internationaux du cinéma international. Mais où ? Cela importe peu si HAOLLYWOOD existe. C’est la fin de cette série de 7 fictions sur la politique haïtienne et sur le cinéma.
Cette série n’avait pas l’ambition de ravir la place de Hollywood sur son parcours. Le nom y est inspiré certes, mais la démarche est tout à fait légitime. D’autant plus légitime quand un deal de 20 ans (à 2033) maintient les Oscars à Hollywood par la grâce du CIM Groupe. Il est impératif de nous retrouver rapidement sur la route du cinéma. Le rêve est réalisable. Merci d’y croire !