Il y eut d’abord l’initiative dérisoire, prise par Huberta von Voss Wittig, la femme de l’ambassadeur d’Allemagne et Sheila Lyall Grant, la femme de l’ambassadeur de Grande-Bretagne auprès des Nations Unies, qui ont fait le pari impossible d’unir leur voix pour faire taire celles des armes. Dans une vidéo concoctées par leur soin, elles adjurent la femme du dictateur, Asma Al-Assad d’être la voix de la paix et d’aider à mettre fin aux violences en Syrie. Un joli coup de publicité, mais surtout un coup d’épée dans l’eau.
La vidéo dure environ 4 minutes. Quatre minutes impressionnantes au cours desquelles une voix off commente sobrement des images d’une violence inouie sur lesquelles on peut voir des mères en larmes au côté de leur enfant ensanglanté ou mort et des cadavres recouverts d’un drap blanc en guise de linceul qui se superposent à celles d’Asma élégante, aérienne, descendant d’un avion en compagnie de son mari. Symbole parfait de la femme moderne. La voix sobre, telle celle d’une Antigone déchirée par le destin, implore la première dame de Syrie de s’impliquer dans le combat. D’être digne, comme ces femmes qui n’ont pas hésité à descendre dans la rue pour protester paisiblement. Comme ces femmes qui n’ont pas reculé devant le danger qu’elles prennent chaque jour.
Les images sont d’autant plus fortes qu’elles oscillent constamment entre clarté et obscurité. Vie et mort. « Certaines femmes se préoccupent de leur style, d’autres se préoccupent de leurs proches, dit la voix survolant des images qui soulignent le contraste entre la vie privilégiée de la première dame et celle de son peuple. « Beaucoup de femmes ont été victimes des violences du gouvernement. Beaucoup d’entre elles ont pourtant pris le risque de parler et de se battre pour la liberté pendant la longue année de manifestations. Nous demandons à Asma de prendre un risque, elle aussi, et de dire ouvertement : arrêtons le carnage, arrêtons-le maintenant. »
La vidéo se termine et on se prend à espérer un bref instant, que cette femme lumineuse qu’était Asma il y a peu de temps encore, entendra cette supplique adressée depuis New York par deux femmes.
En février, elle écrivait au Times : « le président est le président de la Syrie, pas d’une faction de Syriens et la première dame le soutiendra dans ce rôle. La première dame est très occupée et se concentre sur les diverses associations caritatives qu’elle soutient depuis longtemps, le développement rural, et se doit aussi de soutenir son mari comme il convient. » On sait maintenant qu’elle avait déjà choisi son camp.
Autre initiative plus discrète, celle des femmes de diplomates qui, à l’occasion de leur annuel bazar caritatif -parrainé par l’Islamic Heritage Society- ont reversé les fonds récoltés lors de la vente de produits en provenance de 50 pays, au Haut Commissariat aux Refugies (HCR) au profit de refugiés syriens. La mission du Koweït avait mis ses locaux à la disposition de pays désireux de participer au bazar -presque tous arabes- sauf pour la Belgique, le Monténégro et la Macédoine qui avaient tenus à participer. Selon le HCR, plus de 55,000 personnes auraient fui vers les pays voisins.
Célhia de Lavarène, Nations Unies, New York
12 mai 2012